Je me souviens très bien de la première campagne de pub sur le sujet. On était au milieu des années 90, j’avais des pogs dans la main droite et une carte téléphonique dans la main gauche, et la marque Comptoir des cotonniers organisait un casting sauvage mère/fille.
Faisant fi de nos centimètres manquants (sauvage, le casting, mais répondant aux diktats de la mode et de la minceur, il ne fallait quand même pas trop en demander), je me rappelle avoir proposé à ma mère de tenter notre chance. Comme quoi l’idée du vêtement intergénérationnel était déjà là, ancrée quelque part en moi.
Charlotte Gainsbourg et sa fille occupèrent finalement les encarts publicitaires, mais je n’avais pas dit mon dernier mot. Laissez-moi le temps d’enfanter, et l’heure de la revanche sonnerait.
Ce qui tombait à point nommé, c’est que pendant que j’accouchais, les marques exploitaient allègrement le filon (toute cette génération de mères nouvellement nommées, frustrées de ne pas avoir été reçues avec la leur au casting Comptoir des cotonniers, il y avait là un marché).
C’est ainsi que les premiers vêtements que j’achetai à mes enfants furent des sweats estampillés “mini cool”, assortis au mien “maman cool” (l’important, c’est de se convaincre).
Puis, je suis montée progressivement en puissance. Je leur achetais une marinière ? Il m’en fallait une aussi. J’avais une salopette ? Et me voilà de courir les magasins pour leur trouver pareil accoutrement.
C’était d’autant plus étrange que je n’assumais pas totalement nos vêtements coordonnés.
Chez moi, ok. En photo sur Instagram, ok. Mais pour aller chercher le pain, nope. Si, à la maison, je trouvais ça drôle, à l’extérieur, j’avais l’impression que nous formions un de ces vieux couples sur la plage arborant le même K-way.
Une autre difficulté venait s’ajouter à nos tenues matchy/matchy : l’obligation de les porter en même temps. Parce que coordonner ses vêtements, facile. Mais coordonner ses lessives, beaucoup moins. Il y avait toujours un moment où le sweat mini cool était tâché alors que le mien était propre, et où, de fait, le message brodé me faisait mentir. Frotter les tâches me rendait beaucoup moins cool.
Bref, le jour où j’avais finalement accepté l’idée que je n’avais pas fait des enfants pour qu’ils me ressemblent, bien décidée à enfiler le premier truc qui me venait sous la main, mon aîné me lança : « Oh, tu as mis ta marinière. Je peux mettre mon tee-shirt rayé pour qu’on soit habillé pareil ? »
Les dés étaient jetés. Je l’avais bel et bien contaminé.