Problème qui touche de nombreuses femmes jeunes, l’incontinence est pourtant un sujet tabou dans cette société où l’image de la femme est trop souvent associée à un modèle de perfection. Sauf que, même si on a vu plus glamour on en convient, les fuites urinaires ne sont rien de plus qu’un dysfonctionnement physiologique indépendant de notre volonté. Alors pourquoi le cacher ? Le Dr Arnaud Cherasse, chirurgien urologue à la Clinique du Val d’Ouest de Lyon, nous parle de cette pathologie, qui, bonne nouvelle, peut presque toujours être soignée.
Les causes de l’incontinence
À l’heure où il y a une véritable revendication de la femme à l’aise dans ses baskets et qui vit sa vie comme elle l’entend, il n’est malgré tout pas encore évident de parler de fuites urinaires, surtout quand on a à peine 30 ou 40 ans. Pourtant, beaucoup de jeunes femmes sont concernées : « la moitié de mes patientes ont moins de 45/50 ans », souligne le Dr Arnaud Cherasse. Et oui, l’incontinence est loin d’être anecdotique chez les femmes jeunes !
Mais alors pourquoi ? Il y a en fait une multitude de causes à l’incontinence urinaire. Un accouchement un peu difficile peut par exemple provoquer une modification anatomique. Elle peut également être due à un choc physique, une pratique sportive intense et mal encadrée, des calculs vésiculaires, des infections urinaires, une instabilité vésicale, une perturbation du fonctionnement de la vessie provoquée par un excès de consommation de liquides, une tumeur de la vessie (rare), à des anomalies fonctionnelles (sphincter trop tonique) ou anatomiques (canal urinaire trop étroit), ou encore survenir au décours d’une chirurgie. « La cause peut même parfois être liée à des troubles du transit comme la constipation. C’est pourquoi il est important d’en parler à un professionnel de santé » ajoute le Dr Cherasse.
Dire non à la fatalité
Quelle qu’en soit la cause, l’incontinence urinaire peut être aujourd’hui soignée dans la quasi-totalité des cas. « La France est un pays qui n’a aucun retard sur les innovations médico-chirurgicales. On a même beaucoup d’avance sur le traitement des maladies graves et sur la rééducation, on s’attache donc aujourd’hui à travailler sur la qualité de vie. L’objectif n’est plus seulement de guérir mais de permettre de bien vivre ». Dorénavant, la médecine vise à contribuer à notre épanouissement au travail, à la maison, dans nos relations sociales et dans notre intimité. Sauf qu’actuellement, trop de femmes renoncent à des choses en raison d’une incontinence urinaire : aller à leur cours de gym, jouer avec leurs enfants, avoir des relations intimes avec leur partenaire… « ça peut aller jusqu’à la dépression, la faillite du couple… alors qu’il s’agit d’abord d’une question médicale » indique le Dr Cherasse.
Alors que faire ? « La première chose est d’en parler à son médecin traitant, à son gynécologue ou à sa sage-femme : aucune femme en 2020 ne devrait perdre ses urines ! » alerte le Dr Cherasse. La patiente est alors souvent orientée vers un kinésithérapeute en vue d’une rééducation. En cas d’échec ou de résultats insuffisants, elle est dirigée vers un chirurgien urologue. « Les femmes sont trop peu informées de ce qu’il existe en terme de traitements. La seule information à laquelle elles sont exposées concerne les protections pour les fuites urinaires, c’est une aberration ! Ça n’est en aucun cas une solution ! ». En France, il existe même aujourd’hui une médecine transversale en pelvi-périnéologie qui regroupe urologues, gynécologues, gastro-entérologues, proctologues, sages-femmes, kinésithérapeutes, sexothérapeutes… pour travailler sur la prise en charge de ce type de pathologies.
À chaque incontinence sa solution
Si on perd ses urines quand on tousse, éternue ou rit… c’est l’incontinence à l’effort. Une rééducation périnéale est souvent suffisante. Si ce n’est pas le cas, l’urologue peut réaliser un acte chirurgical en ambulatoire : sous anesthésie locale ou générale, il pose une bandelette qui va stopper l’incontinence. « C’est un acte assez simple qui se réalise en 20mn » précise le Dr Cherasse.
Si l’incontinence prend la forme d’envie trop pressante qui nécessite d’avoir des toilettes sans cesse à portée de mains, on parle alors d’incontinence par impériosité. Dans ce cas, un bilan uro-dynamique est réalisé pour savoir s’il existe une instabilité de la vessie. « Ce bilan indique si la patiente relève d’une indication de chirurgie, d’une rééducation, d’un traitement médicamenteux, au laser ou par botox. » La neuromodulation peut être aussi envisagée lorsque l’instabilité vésicale est rebelle à tous les traitements : un neurostimulateur qu’on pourrait comparer à un stimulateur cardiaque appelé plus communément pacemaker, stimule les nerfs pour aider à reprendre le contrôle de sa vessie.
L’incontinence mixte, qui associe les deux précédentes, avec souvent une dominance pour l’une ou l’autre, suit les mêmes traitements.
L’incontinence est fréquente chez la femme, jeune ou moins jeune, et elle nécessite, comme n’importe quelle autre pathologie, de consulter un professionnel de santé. Si vous êtes concernée, sachez que vous n’êtes pas un cas isolé et qu’il n’y a aucune raison d’avoir honte de consulter : vous n’êtes pas responsable de votre incontinence ! Et si vous n’êtes pas à l’aise avec le médecin traitant qui vous suit depuis que vous êtes aussi haute que 3 pommes, n’hésitez pas à vous tourner vers un gynécologue ou une sage-femme. Il est en effet important d’être à l’aise avec son interlocuteur : si la première consultation ne vous satisfait pas, ne baissez pas les bras et foncez consulter quelqu’un d’autre car vous méritez de vivre normalement, tout simplement.
L’incontinence anale
Encore moins glamour pour ne pas dire dégradant et par conséquent encore plus tabou, l’incontinence anale se définit par l’émission involontaire de gaz ou de selles. Un accouchement difficile peut en être à l’origine, mais là encore les causes peuvent être multiples. Comme pour l’incontinence urinaire, des solutions médicales et chirurgicales existent : il faut en parler !
Pour en savoir plus : Association française d’urologie : urofrance.org.