Vous avez déjà eu envie de troquer vos jambes contre une paire de rollers pendant une soirée tranquille sur le canapé ? Ressenti cette drôle d’impatience qui donne envie de piétiner, de rallumer la lumière ou même d’aller faire le tour du salon à minuit passé ? Si oui, vous n’êtes pas seul : derrière ces sensations parfois diffuses se cache peut-être un trouble encore largement méconnu et, surtout, très répandu.
Quand les jambes font leur révolution : reconnaître le SJSR
Avez-vous déjà ressenti une pression, un inconfort au niveau des jambes, et plus précisément au mollet ? Ce désagrément peut devenir tel qu’il oblige à bouger les membres… ou à sauter du lit pour marcher un peu. Si cela vous parle, sachez que vous faites peut-être partie des 7 à 10 % de la population touchée par le syndrome des jambes sans repos (SJSR), également connu sous le nom de maladie de Willis-Ekbom.
Le Dr Philippe Mhu, neurologue à Lorient, met en avant que cette sensation est difficile à définir. Elle n’est pas toujours douloureuse, mais elle surgit de préférence en situation de repos – souvent dans la deuxième partie de la journée. Et, cerise sur le gâteau, dans 90 % des cas, ces impatiences entraînent aussi des mouvements involontaires des jambes pendant le sommeil. Autant dire que c’est parfois le conjoint qui s’en aperçoit le premier, quand les draps valsent au rythme des soubresauts nocturnes !
Impatiences passagères ou véritable syndrome ?
Bonne nouvelle : tout le monde ou presque vivra, à un moment ou un autre, ces fameuses « impatiences » dans les jambes. Pas de panique, ce n’est pas forcément grave. Mais, alerte rouge, il est temps de se poser des questions si ces sensations deviennent chroniques.
En Europe, les formes sévères du SJSR – celles qui perturbent plus de deux jours par semaine – concernent 2 % de la population. Pour ces personnes, les conséquences sont loin d’être anodines : la qualité de vie et le sommeil peuvent être sérieusement impactés. Alors, avant de blâmer le matelas ou la météo bretonne, il peut être utile d’évoquer ces symptômes avec un professionnel !
Un trouble aux multiples origines… et au diagnostic trop rare
Le SJSR reste, aujourd’hui encore, un mystère partiellement élucidé pour la médecine. Les causes précises ne sont pas clairement identifiées, mais plusieurs pistes émergent :
- Mauvaise utilisation de la dopamine (ce précieux neurotransmetteur cérébral). Ici, ce n’est pas la quantité de dopamine qui pose souci, mais une défaillance dans l’utilisation de ses récepteurs.
- Carence en fer
- Insuffisance rénale
- Grossesse
- Neuropathie
- Certaines prises médicamenteuses, notamment les antidépresseurs
Malgré sa fréquence, le SJSR demeure très souvent mal diagnostiqué. Le Dr Mhu déplore même que le trouble soit négligé par certains médecins, faute d’information ou par assimilation trop rapide aux « simples impatiences ». Résultat : nombre de patients sont traités pour des insuffisances veineuses plutôt que pour le vrai problème.
Des solutions existent, mais leur usage doit être avisé
Heureusement, il y a des motifs d’espoir. Dans les formes les moins sévères, soigner son hygiène de vie peut être suffisant pour voir disparaître les symptômes. Pour les syndromes plus coriaces liés à la dopamine, des traitements puissants existent depuis une vingtaine d’années : les agonistes dopaminergiques. Leur efficacité est loin d’être une légende urbaine ! Selon le Dr Mhu : « Des personnes qui ont souffert pendant deux ou trois ans vont se sentir mieux en une semaine ».
Néanmoins, ces traitements doivent être maniés avec précaution. Ils peuvent, chez 10 à 15 % des patients, entraîner des comportements addictifs – un détail qui n’a rien d’anecdotique. C’est la raison pour laquelle leur prescription est strictement encadrée : il faut d’abord consulter son médecin généraliste afin d’être orienté vers un neurologue. Autre point de vigilance, souligné par la Haute autorité de santé : ces médicaments ne sont recommandés que dans les formes très sévères de SJSR.
En conclusion, si vos jambes vous jouent des tours sous la table ou dans les draps, ne minimisez pas ce mal. Un dialogue ouvert avec votre médecin, et éventuellement un spécialiste, est la meilleure piste pour retrouver des nuits et des journées plus sereines. Oubliez les diagnostics hâtifs et les idées reçues : derrière « de simples impatiences », il y a parfois tout un syndrome à apprivoiser… jambes et sommeil vous diront merci !
